Le droit de recours de l’assureur responsabilité civile en cas de faute grave

L’institution de l’assurance responsabilité civile (assurance RC) obligatoire pour véhicules à moteur est généralement connue de tout conducteur.

Pour rappel, cette obligation est prévue à l’art. 63 de la Loi fédérale sur la circulation routière (ci-après : LCR) qui mentionne qu’ « aucun véhicule automobile ne peut être mis en circulation sur la voie publique avant qu’ait été conclue une assurance responsabilité civile conforme aux dispositions qui suivent. ».

Cette obligation de conclure une assurance RC a pour but d’assurer l’indemnisation des personnes lésées par le comportement du conducteur (preneur d’assurance) responsable. En d’autres termes, l’assurance RC permettra de couvrir les prétentions civiles des personnes lésées suite à un comportement illicite et fautif du conducteur assuré, ce qui sera également dans l’intérêt de ce dernier puisque son patrimoine ne s’en trouvera pas affecté. Du moins, il s’agit du principe.

Une institution qui est précisément moins connue, mais dont l’importance n’est pas des moindres, est celle du droit de recours de l’assureur RC en cas de faute grave du conducteur. En présence d’une assurance RC obligatoire, selon ce qui a été dit plus haut, nous pourrions être tentés de croire que nous bénéficions, en tant que conducteur, d’une sorte de « protection absolue » sur le plan financier lorsque nos actes ont causé un dommage à un tiers.

Une réserve très importante doit être émise : en effet, quand bien même la couverture d’assurance qu’il a choisie inclut la faute grave, le conducteur responsable devra, en fonction du type de comportement reproché, mettre à contribution son patrimoine dans le cadre des dommages qu’il a causés. Ainsi, il faut savoir que, outre les conséquences pénales (peines) et administratives (retrait du permis de conduire), certains comportements illicites avec faute grave (cf. infra) auront aussi des conséquences civiles et financières pour le conducteur responsable. Et cela peut être très lourd à supporter !

Ce droit de recours de l’assureur RC contre son propre preneur d’assurance est prévu à l’art. 65 al. 3 LCR qui dit ce qui suit : « L’assureur a un droit de recours contre le preneur d’assurance ou l’assuré dans la mesure où il aurait été autorisé à refuser ou à réduire ses prestations d’après le contrat ou la loi fédérale du 2 avril 1908 sur le contrat d’assurance. L’assureur est tenu de recourir si les dommages ont été causés alors que le conducteur se trouve en état d’ébriété ou dans l’incapacité de conduire, ou qu’il commet un excès de vitesse au sens de l’art. 90, al. 4. L’étendue du recours tient compte du degré de culpabilité et de la situation économique de la personne contre laquelle le recours est formé. ».

Comme vous aurez pu le lire, l’assureur RC est obligé de se retourner contre le conducteur dans certains cas. Il s’agit en particulier de l’ivresse qualifiée au volant ou de la conduite sous l’influence de stupéfiants. Ainsi, comme nous l’avions évoqué plus haut, certains types de comportements engendreront inévitablement des conséquences pécuniaires pour le conducteur responsable. De manière simplifiée, l’assureur RC indemnisera (obligatoirement) la personne lésée, puis demandera au conducteur responsable, soit à son propre client, de lui rembourser une partie des indemnités versées.

De manière générale, lorsqu’un accident aura causé non seulement des dommages matériels mais également corporels, les conséquences pour la personne lésée sont souvent très lourdes. Elles le seront également pour le conducteur responsable qui était dans une situation d’ivresse qualifiée ou de conduite sous l’emprise de stupéfiants. Lors d’un grave accident, la personne lésée connaîtra souvent une période d’incapacité de travail avec intervention dans un premier temps de l’assurance-accident qui aura notamment pour mission de fournir un revenu de substitution (indemnités journalières LAA). Malheureusement, il n’est pas rare que l’incapacité de travail soit définitive et qu’elle débouche sur une invalidité partielle, voire totale, après intervention de l’assurance-invalidité qui versera cas échéant une rente. Dans cette hypothèse où la personne lésée subit une atteinte à son avenir économique (absence de revenus suite à une invalidité), les prestations que doit fournir l’assurance RC à la personne lésée (ou aux assurances sociales qui sont intervenues) peuvent aisément se chiffrer en centaines de milliers de francs ! En considérant que les assurances RC, dans les cas d’ivresse au volant ou de conduite sous stupéfiants, exercent régulièrement des recours contre le conducteur responsable pour 35% minimum (les recours pour 40% voire même 55% minimum étant également courants), nul besoin de préciser que la situation pour le preneur d’assurance responsable sera extrêmement délicate, pour ne pas dire accablante.

En somme, il y a faute grave et faute grave. Causer un dommage suite à un accident peut arriver à tout conducteur. Ce qu’il convient toutefois de retenir, c’est que l’ivresse qualifiée ou la conduite sous l’influence de stupéfiants consistent en deux fautes graves bien particulières qui sont très lourdes de conséquences. Ainsi, une fois de plus, il ne peut qu’être vivement conseillé de prendre le volant dans le respect des règles en vigueur !

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